Burn-out de l’entrepreneur : comment se protéger, signes d’alerte et solutions

En tant qu'entrepreneur, il vous arrive peut-être de traverser des phases de découragement, de fatigue, de vous sentir parfois dans l'impasse face à la multiplicité des tâches à accomplir dans votre activité. Vous travaillez probablement sans compter vos heures pour que votre entreprise fonctionne. Parfois, ces situations prennent des proportions bien plus importantes, conduisant à un épuisement total impossible à soigner en prenant de simples vacances. Comment se protéger du burn-out de l'entrepreneur ? Quels symptômes doivent vous alerter ? Quel plan d'action mettre en place pour éviter que la situation ne dégénère et que faire si c'est déjà trop tard ?

Dans cet article, je vous propose quelques conseils sur cette maladie afin de ne pas la laisser prendre le dessus si elle frappe à votre porte. L'entrepreneuriat vous expose en effet tout particulièrement au stress, exacerbe souvent votre sens des responsabilités. Vous "devez gérer"... au risque d'y laisser votre énergie. Que faire pour que ça n'aille pas trop loin ?

Qu'est-ce que le burn-out de l'entrepreneur et quelle est sa cible ?

Le burn-out peut être décrit comme un état d'épuisement total : vous êtes littéralement vidé de toute énergie, que ce soit sur le plan physique, mental, émotionnel. Cet état fait souvent suite à un stress prolongé et excessif : votre corps et votre esprit n'arrivent plus à faire face, si bien qu'ils "débranchent". Les conséquences vont alors affecter votre vie dans son ensemble, et pas uniquement l'aspect business des choses.

Contrairement à ce que l'on peut imaginer, le burn-out de l'entrepreneur ne touche pas des personnes mal organisées ou incompétentes, qui se "laisseraient dépasser" par les événements. Il peut au contraire frapper tout un chacun, indépendamment du genre et de l'âge, salariés comme indépendants, en particulier :

• Les personnes perfectionnistes : parce qu'elles ont du mal à lâcher du lest ou à déprioriser certaines choses par peur de rendre un travail médiocre ; parce qu'elles ont, même dans l'urgence, le souci du détail ; parce qu'elles mettent la barre très haut et s'imposent donc davantage de pression ;
• Les personnes ayant du mal à dire non aux autres : elles sont plus exposées au risque d'être submergées de tâches à accomplir, faute d'avoir posé des limites ;
• Ceux qui ont tendance à se noyer dans le travail sans laisser beaucoup de place à leur vie privée ;
• Ceux qui traversent une période de fragilité (qu'elle soit temporaire ou plus durable - manque de confiance en soi, dépression, passage à vide, etc.) ;
• Ceux qui portent une charge mentale importante, pas forcément dans le travail ;
• Les personnes qui ont tendance à vouloir tout contrôler et ont peur de déléguer des missions aux autres, se sentant obligées de tout assumer elles-mêmes.

Si vous êtes dans une ou plusieurs de ces situations, vous pouvez être plus vulnérable au burn-out.

Les symptômes du burnout chez l'entrepreneur

Souvent, avant d'atteindre le "niveau burn-out", celui de l'épuisement irréversible à moyen terme, il existe un certain nombre de signaux d'alerte. Si vous apprenez à détecter ces signes, vous pouvez agir ! Ce n'est pas aussi facile qu'il n'y paraît car souvent, quand on est sur le fil vis-à-vis du burn-out dans son activité professionnelle, on a la tête dans le guidon et pas forcément la capacité d'introspection nécessaire pour examiner la situation avec un regard critique.

C'est pour cette raison qu'il peut aussi être intéressant de prendre en compte les remarques de votre entourage. Si vous ressentez ou qu'on vous reproche régulièrement l'une des choses ci-dessous, posez-vous des questions :

• Vous vous sentez souvent submergé par votre travail ;
• Vous avez du mal à vous arrêter et avez l'impression de ne pas arriver à suivre le rythme ;
• Vous avez du mal à vous concentrer et à prendre des décisions, que ce soit dans le travail ou dans votre vie personnelle ;
• Vous ressentez un manque de motivation généralisé ;
• Vous n'avez plus le même enthousiasme pour votre métier, alors que vous travaillez toujours autant d'heures "en quantité" ;
• Vous avez des troubles de la mémoire, les événements semblent ne pas s'imprimer dans votre esprit ;
• Vous éprouvez un certain détachement vis-à-vis des choses, ou adoptez un regard très cynique sur votre quotidien ;
• Vous vous montrez parfois agressif avec votre entourage, plus qu'avant ;
• Vous développez certains problèmes de santé : des insomnies, un sentiment de fatigue permanente, des maux de tête, des douleurs cervicales, des problèmes de dos...

Bien sûr, on peut ressentir tout ça de manière ponctuelle sans que ce soit un signe de burn-out... mais si vous remarquez que ça s'installe de manière assez régulière, que ces symptômes se cumulent entre eux, prudence et vigilance s'imposent !

Comment prévenir le burn-out de l'entrepreneur ?

L'équilibre pro/perso

La première mesure de prévention contre les risques de burn-out consiste à bâtir un véritable équilibre entre votre entreprise et votre vie privée. Sur le papier, voilà qui paraît simple… mais dans les faits, beaucoup d'indépendants et d'entrepreneurs ont du mal à y parvenir.

Vous voulez que votre business marche bien, que votre activité décolle… et vous avez l'impression que pour atteindre ces objectifs, il faut se dévouer corps et âme à son entreprise. Faire une pause, DES pauseS ? Sacrilège ! En cas d'échec, vous ne pourriez pas vous le pardonner…

Pourtant, apprendre à créer cette frontière entre professionnel et personnel est indispensable :

• Ca vous permet d'avoir un espace où rechercher vos batteries ;
• Ca vous rappelle qu'il existe d'autres sources d'épanouissement que le travail : des loisirs, une vie sociale, des activités "plaisir" ;
• Vous pouvez échanger avec des personnes issues d'autres horizons, ayant d'autres centres d'intérêt : cela vous ouvre l'esprit ;
• C'est l'occasion de prendre soin de sa santé : faire du sport, cuisiner de bons repas, faire le marché, consulter un médecin en temps et en heure au lieu de laisser traîner certains sujets parce que le business prend le dessus (que ce soit l'ophtalmo, le dentiste, ce grain de beauté un peu louche que vous ne prenez pas le temps de montrer à un dermato, etc).

Réussir à prendre des pauses passe par des actions très concrètes : vous imposer des horaires (même les indépendants doivent savoir mettre un terme à leur journée de travail !) ; couper votre boîte mail à certains moments (hormis si vous travaillez dans un domaine mettant en jeu des vies humaines, "l'urgence" dans la plupart des métiers reste relative) ; prévoir du temps dans votre agenda pour les imprévus. Cela évitera qu'ils empiètent sur votre temps libre.

Apprendre à dire non

Vous avez peut-être l'impression que dire non va renvoyer une mauvaise image de vous, vous faire passer pour une personne peu bienveillante. Or, le "non" est salutaire pour éviter le burn-out dans une entreprise, en particulier dans une activité indépendante.

Vous pouvez crouler sous les demandes (et c'est tout le mal que je vous souhaite !), il y aura toujours :

• Une part de demandes déraisonnables (que ce soit par le délai, le tarif, la nature même de la mission, l'attitude de la personne qui vous l'adresse) ;
• Une part de demandes que vous ne pourrez pas gérer : manque de temps, surcharge de projets, compétences en décalage avec le besoin immédiat du client...

Savoir dire non vous évite alors de vous retrouver dans des situations périlleuses qui, au fond, risquent de faire du tort à votre bien-être et/ou à votre réputation. Si certains y parviennent très facilement, pour d'autres ça implique un vrai travail sur soi afin d'accepter l'idée que ce "non" n'est pas un aveu de faiblesse ou d'incapacité, mais au contraire la preuve d'un grand réalisme quant à votre travail. Je vous donne des conseils ici pour apprendre à dire non.

Prioriser ses tâches

Parfois, à force de multiplier les "to-do lists", de se faire une idée dans sa tête de la manière "parfaite" de gérer son entreprise, les entrepreneurs finissent par manquer de recul sur les priorités. Qu'est-ce qui est vraiment stratégique pour votre activité et qu'est-ce qui peut être reporté ou délégué sans conséquences ?

Le burn-out de l'entrepreneur peut être alimenté par l'impression que l'on doit absolument tout gérer, tout maîtriser, tout contrôler à chaque instant... d'où l'importance d'apprendre à détecter ce sur quoi vous pouvez lâcher du lest.

En la matière, j'aime beaucoup la méthode de Michael Hyatt pour prioriser ses tâches.

Savoir s'entourer

Dire qu'il est important d'être bien entouré semble être un lieu commun, une banalité parmi tant d'autres... mais c'est une nécessité on ne peut plus sérieuse et parfois négligée.

Ca signifie quoi ?

• Avoir un cercle proche présent et bienveillant - Pouvoir voir des amis, faire sortir la pression, obtenir des conseils ou des avis extérieurs non teintés de jalousie ou de reproche, constitue un garde-fou essentiel à votre santé mentale. Parfois, quand on travaille trop, on se coupe en partie de cette vie relationnelle. Et parfois, avec un peu d'esprit critique, on se rend compte que l'entourage abrite quelques "éléments toxiques" dont il serait préférable de s'éloigner.
• Trouver des personnes de confiance à qui déléguer - Plus votre activité va se développer, plus il va devenir essentiel de déléguer certaines tâches. Il est important de réfléchir à qui, et en quels termes.

Avoir un business model robuste

On oublie souvent ce petit détail mais un business model bancal peut être un vrai déclencheur de burn-out chez les entrepreneurs. Si vos prestations sont vendues à des prix trop bas, que vous avez tendance à sous-estimer le temps passé, que votre contrat avec vos clients est bancal et ne vous protège pas de certains abus possibles, vous risquez de vous sentir obligé d'accepter mille projets pour être rentable, au risque de vous épuiser.

Si vous ne l'avez pas fait récemment, prenez le temps de faire un benchmark de la concurrence (à quel prix vos concurrents se vendent-ils ?). Passez aussi en revue les imprévus qui vous ont déjà mis en péril ou ont occasionné du stress : par exemple, le client qui refuse de payer parce que le résultat ne lui convient pas ; le pointilleux qui vous demande de refaire 6 fois le travail ; le gourmand, qui vous contacte à toute heure avec des demandes toujours urgentes. Votre contrat cadre-t-il ces situations ?

Si ce n'est pas le cas, il peut être utile de vous rapprocher d'un professionnel du droit (connaissant si possible votre secteur d'activité) afin de disposer d'un modèle de contrat qui vous protège. C'est un petit investissement, mais il peut sauver votre entreprise comme votre santé mentale !

Que faire si vous êtes déjà engagé dans la spirale du burn-out ?

Si vous êtes sur le point de basculer mais que vous n'avez pas encore atteint le stade ultime du burn-out, il est encore temps d'agir mais il va falloir faire des choix drastiques : réduire le rythme, en considérant que votre vie en dépend.

"Ah non, moi je ne peux pas", diront certains.

Pour dire les choses sans prendre de pincettes, si vous appreniez là maintenant tout de suite que vous avez un cancer, qu'il faut commencer une chimio, vous iriez sans doute au combat en trouvant des solutions pour que votre planning laisse de la place au traitement. Partez du principe que c'est la même chose avec le burn-out de l'entrepreneur : le burn-out n'est pas un phénomène anodin mais une situation grave, acceptez-la comme telle.

Renoncez à certaines activités, à certains contrats s'il le faut. Reposez-vous sur votre conjoint.e si c'est possible. Arrêtez-vous. Faites-vous aider par un professionnel : cela peut non seulement vous aider à évacuer toutes les émotions négatives qui vous habitent (le sentiment d'impuissance, de ne plus arriver à gérer, etc) mais aussi vous donner des clés pour réorganiser votre quotidien afin de guérir.

Il faut peu à peu décortiquer la manière dont vous en êtes arrivé là, pour mettre en place des solutions efficaces.

Si vous êtes déjà victime du burn-out, il n'y a là aussi qu'un remède, même s'il ne va sans doute pas vous plaire : s'arrêter. S'efforcer de continuer à gérer "à moitié", comme on peut, équivaut à mettre un pansement sur une jambe cassée. Ce n'est pas ça qui vous permettra de remarcher normalement.

Il faut d'abord se mettre au repos, laisser à votre corps et à votre esprit le temps de quitter la phase de "surrégime" dans laquelle ils se sont enfermés, souvent insidieusement et progressivement. Ca peut être long, en particulier si vous êtes au stade où vous avez développé de lourds symptômes physiques. Ca passe souvent par le fait de retrouver un rythme de sommeil, de s'aérer (par le sport, des activités plaisantes qui vous vident la tête)...

Dans un second temps, il faudra analyser la manière dont le burn-out s'est installé. S'il existe un dénominateur commun, celui d'un stress aigu poussé à son paroxysme, le burn-out reste un état "multifactoriel", qui peut avoir plusieurs causes. Il sera impératif d'analyser ce qui s'est produit dans VOTRE cas, pour mettre en place un plan d'action adapté à VOTRE situation.

Retenez qu'il n'y a pas de solution miracle : de la même manière que le burn-out s'installe petit à petit, on en sort aussi petit à petit. Accordez-vous ce temps, qui vous apprendra beaucoup sur vous-même pour ne pas retomber dans la même spirale. Si cela peut vous aider (ou aider un proche que vous sentez "sur la mauvaise pente"), je vous conseille la lecture de ce guide d'Anne Everard sur le sujet, qui est à la fois concret et bienveillant.

Aucun livre ne remplacera un accompagnement dédié mais c'est parfois une bouée de sauvetage bienvenue pour se rappeler qu'il existe des solutions !